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Moodboard : La jeune fille et la mort

Mourir dans la buée ardente de l'été, 
Quand parfumé, penchant et lourd comme une grappe, 
Le coeur, que la rumeur de l'air balance et frappe, 
S'égrène en douloureuse et douce volupté.

Mourir, baignant ses mains aux fraîcheurs du feuillage, 
Joignant ses yeux aux yeux fleurissants des bois verts, 
Se mêlant à l'antique et naissant univers, 
Ayant en même temps sa jeunesse et son âge,

S'en aller calmement avec la fin du jour ; 
Mourir des flèches d'or du tendre crépuscule, 
Sentir que l'âme douce et paisible recule 
Vers la terre profonde et l'immortel amour.

S'en aller pour goûter en elle ce mystère 
D'être l'herbe, le grain, la chaleur et les eaux, 
S'endormir dans la plaine aux verdoyants réseaux, 
Mourir pour être encor plus proche de la terre...

– Anna de Noailles
How wonderful is Death,
Death, and his brother Sleep!
One, pale as yonder waning moon
With lips of lurid blue;
The other, rosy as the morn
When throned on ocean’s wave
It blushes o’er the world;
Yet both so passing wonderful!

– Percy Bysshe Shelley
La Jeune Fille
Va-t'en, ah, va-t'en!
Disparais, odieux squelette!
Je suis encore jeune, disparais!
Et ne me touche pas! »

La Mort
Donne-moi la main, douce et belle créature!
Je suis ton amie, tu n'as rien à craindre.
Laisse-toi faire! N'aie pas peur
Viens sagement dormir dans mes bras

— Matthias Claudius
Dans une terre grasse et pleine d'escargots 
Je veux creuser moi-même une fosse profonde, 
Où je puisse à loisir étaler mes vieux os 
Et dormir dans l'oubli comme un requin dans l'onde,

Je hais les testaments et je hais les tombeaux ; 
Plutôt que d'implorer une larme du monde, 
Vivant, j'aimerais mieux inviter les corbeaux 
A saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.

Ô vers ! noirs compagnons sans oreille et sans yeux, 
Voyez venir à vous un mort libre et joyeux ; 
Philosophes viveurs, fils de la pourriture,

A travers ma ruine allez donc sans remords, 
Et dites-moi s'il est encor quelque torture 
Pour ce vieux corps sans âme et mort parmi les morts !

– Charles Baudelaire